Retard de langage ou troubles du langage ? |
Au sein d’un groupe d’enfants dont le langage se met en place « normalement », une variation naturelle et assez importante existe dans le rythme des différentes étapes ; certains démontrant une précocité relative, d’autres des retards d’acquisition plus ou moins prononcés. |
Le retard de langage est nécessairement transitoire |
l’enfant présente un niveau de langage (vocabulaire, élocution, prononciation, etc.) que l’on observe habituellement chez un enfant plus jeune de quelques mois, voire d’une année. Toutefois, vers l’âge de 6 ans habituellement, ce retard est comblé. De plus, malgré un décalage dans le temps, les différentes étapes de développement ont été respectées. |
Le trouble du langage, une cassure ? |
Le trouble du langage, quant à lui, représente une cassure quant à la séquence du développement normal. Il peut au départ être confondu avec un simple retard, mais des difficultés plus importantes émergent nécessairement et constituent des atypies nettes en comparaison du développement normal. Il est noté que les premiers jalons développementaux (premiers mots, premières associations de mots, etc.) sont retardés dans presque toutes les formes de trouble du langage. Les profils langagiers d’enfants présentant un trouble du langage sont extrêmement variables d’un individu à l’autre. Tous les aspects de la communication peuvent être touchés de façon plus ou moins sévère (expression, compréhension, phonologie, morphologie, syntaxe, sémantique, pragmatique, élocution, etc.). Ces profils sont également évolutifs, certaines améliorations notables pouvant être observées quant à un aspect du langage, d’autres pouvant montrer une stagnation, voire une dégradation avec le temps.
|
Un trouble neuro-développemental ? |
Le neuro-développement désigne l’ensemble des mécanismes qui vont guider la façon dont le cerveau se développe, orchestrant les fonctions cérébrales (fonction motrice, langagière, cognitive, d’intégration sensorielle, structuration psychique, comportement, etc.). C’est un processus dynamique, influencé par de nombreux facteurs (biologiques, génétiques, affectifs, environnementaux…). Le neuro-développement commence avant la naissance et se poursuit jusqu’à l’âge adulte. Chaque jour les capacités de l’enfant sont modifiées, de façon plus ou moins rapide selon les individus, mais en suivant des étapes incontournables. La perturbation de ces processus de développement cérébral conduit à un trouble neuro-développemental (TND) correspondant à des difficultés plus ou moins grandes dans une ou plusieurs de ces fonctions cérébrales.
|
Le manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux ou DSM |
Le manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux communément appelé DSM (disponible en français depuis 2015 dans sa cinquième version : DSM-5) et la classification internationale des maladies sont les deux classifications médicales les plus communes. La CIM-10 retient la classification « Troubles spécifiques du développement du langage et de la parole ». Le trouble du langage est positionné dans le DSM-5 parmi les troubles neuro-développementaux, au même titre que les troubles de l’attention, du développement intellectuel, de la motricité, de la communication et des apprentissages ou que les troubles du spectre de l’autisme (TSA).
Le DSM :
Tableau de correspondance des classifications internationales : DSM-5 et CIM-10 Source : CNSA – Troubles Dys, Guide d’appui pour l’élaboration de réponses aux besoins des personnes présentant des troubles spécifiques du langage, des praxies, de l’attention et des apprentissages / Issu des travaux de Franck RAMUS, docteur en sciences cognitives de l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), chargé de recherches au CNRS et membre du comité scientifique de la FFDys.
|
L’évaluation des troubles du langage : le repérage |
Le repérage peut se faire par les parents/la famille, les professionnels de la petite enfance ou de l’école qui constatent une difficulté. Ils alertent alors un professionnel apte à engager les étapes suivantes. |
L’évaluation des troubles du langage : le dépistage |
Le dépistage cherche à identifier l’existence d’un trouble à l’aide d’outils validés. L’objectif est de permettre à la famille et aux enseignants d’apporter une réponse pédagogique adaptée et d’engager une démarche diagnostique plus importante si nécessaire. Ce dépistage permet également de mettre en place un suivi du trouble. Le dépistage est effectué des professionnels spécialisés, médicaux ou non, notamment les psychologues, les médecins, les orthophonistes...
Le repérage, comme le dépistage, doit permettre un accompagnement de l’enfant dans une logique préventive. Lorsque le trouble est avéré et perdure malgré la prise en charge préventive, la poursuite de la démarche diagnostique s’impose afin de déterminer la nécessité ou non de soins selon des référentiels précis.
|
L'arbre diagnostique |
|
L’évaluation des troubles du langage : le diagnostic |
Le diagnostic relève du domaine médical et paramédical et s’inscrit dans une démarche pluridisciplinaire avec, par exemple, une évaluation médicale, orthophonique, psychologique... D’autres professionnels peuvent intervenir au besoin comme les psychomotriciens, les ergothérapeutes, les neuropsychologues, les orthoptistes... Dans tous les cas, il est préconisé qu’un médecin fasse ensuite la synthèse et le diagnostic : le « bilan diagnostique pluridisciplinaire coordonné par un médecin ».
Les professionnels vont notamment chercher à établir que le trouble du langage n’est pas complètement expliqué par une autre cause :
- Une déficience intellectuelle,
- Des troubles psychopathologiques,
- Des carences éducatives ou pédagogiques précoces,
- Des atteintes neurologiques ou sensorielles (épilepsie, surdité...).
C’est donc après avoir éliminé l’hypothèse que l’une (ou plusieurs) de ces étiologies explique à elle seule les troubles présentés par l’enfant que l’on peut parler de troubles spécifiques et durables de développement du langage oral (dysphasies). |
Les principales limitations d’activité et restrictions de participation |
Les troubles spécifiques et durables de développement du langage oral altèrent significativement la communication et les apprentissages. L’enfant rencontre une limitation de ses capacités de communication sur le plan oral, au niveau expressif et/ou réceptif, avec parfois des conséquences sur le traitement du langage écrit. L’enfant ne peut transmettre facilement des informations, des sentiments, des émotions. Parfois, il ne comprend pas complètement ce qui lui est transmis comme information orale. Il peut alors se trouver limité dans ses apprentissages.
Les principaux retentissements concernent :
- La communication pour établir des relations et faire connaître ses besoins élémentaires,
- La compréhension des consignes orales et écrites,
- Les relations et situations d’échanges qui, étant perturbées, peuvent créer un risque d’isolement avec des malentendus et une inadaptation des réponses, mais aussi un manque de discernement et le risque d’être influençable,
- Toutes les restitutions orales, en particulier dans le cadre des évaluations ou pour réciter, raconter... et les restitutions écrites dans la plupart des cas,
- Les apprentissages scolaires,
- L’inclusion scolaire et sociale.
Quelle que soit l’ampleur du trouble du langage dans l’enfance, sa prise en charge précoce et durable permet d’améliorer le niveau de compétence. À l’âge adulte, ces difficultés, dont l’ampleur varie énormément selon les personnes, se retrouvent également. Les personnes affectées sont capables d’organiser un langage qui peut suffire dans la vie quotidienne, mais elles évoluent le plus souvent sans parler parfaitement. La lenteur dans l’exécution de certaines tâches est une caractéristique commune.
Des difficultés dans les relations sociales peuvent apparaître du fait du trouble du langage. Pourtant, l’insertion en milieu professionnel est possible, car malgré des difficultés parfois sévères, ces personnes sont en mesure d’acquérir un savoir-faire professionnel ainsi qu’une autonomie satisfaisante avec des aménagements des conditions de travail et/ou des adaptations matérielles.
Les conséquences sont plus ou moins importantes selon l’intensité des troubles qui peuvent empêcher la personne concernée de trouver sa place dans un groupe et limiter son inclusion familiale, scolaire, professionnelle et sociale. Il existe souvent, par surcroît, des conséquences affectives et parfois comportementales avec un risque important de sentiment d’incompétence, de mauvaise estime de soi, voire de développement de troubles du comportement.
|